Maaike Wouters

Nom : Wouters.
Prénom : Maaike.
Sexe : Féminin.
Âge : 16 ans.

Race : Humaine.

Apparence : Jeune fille plutôt maigrichonne depuis l’accident de sa mère, Maaike préfère en général porter des vêtements informes, qui masquent son manque flagrant de formes au niveau de la poitrine – assez complexant pour son âge, il faut l’avouer. Pourtant, la nature n’a pas été tellement avare dans sa conception : elle l’a dotée d’une magnifique chevelure blonde qui enorgueillit ses parents depuis sa petite enfance, et d’une paire d’yeux vert qui n’ont rien à envier aux iris céruléens de sa sœur. Sa silhouette aurait pu être qualifiée d’élancée – car il faut avouer que sa morphologie tire naturellement vers la verticale plutôt que l’horizontal –, si elle n’avait la fâcheuse habitude de tasser son long cou au creux de ses épaules, comme dans un vain espoir de rester discrète.

Caractère : D’un tempérament assez effacé, en opposition complète à l’étrangeté de sa sœur, Maaike s’est toujours montrée très à l’écoute des autres. Les crises de son aînée lui ont par ailleurs appris les vertus de la patience face à une bombe humaine sur le point d’exploser, si bien que peu de gens l’ont déjà vue en colère, et cette minorité s’accorde à dire qu’elle n’est pas vraiment impressionnante dans cet état : tout juste arrive-t-elle à bafouiller quelques insultes peu convaincantes ! En réalité, certaines paroles de sa sœur l’ont sans doute touchée plus profondément qu’elle n’ose l’avouer, car elle est pratiquement incapable d’infliger la moindre souffrance à un être vivant, si ce n’est peut-être par accident.

Passé : Deux enfants, deux petites têtes blondes jouaient dans un bac à sable. Elles chantaient en cœur une comptine en creusant les douves d’un château en forme de butte, quand un bourdonnement chatouilla les oreilles des gamines : elles marquèrent un mouvement de recul en apercevant la guêpe, qui s’aventurait dangereusement vers le jus de pomme de Maaike. La cadette, cependant, se refusait à abandonner sa boisson au profit de l’insecte : elle s’empara d’un caillou et le lança de toutes ses forces contre l’infâme voleur, qui se le prit de plein fouet ! Alors que Maaike récupérait son bien, triomphante, sa grande sœur s’approcha lentement de la bête, qui se débattait pitoyablement avec son unique aile intacte. Tout d’un coup, Lies se mit à pleurer.

Jan Wouters accourut à la rescousse de sa petite chérie, persuadé que la guêpe agonisante avait piqué la petite fille. Rien de plus faux : « Elle voulait juste un peu de sucre pour ses petites sœurs », répondit-elle simplement, montrant du doigt la malheureuse. Le père pouvait raconter autant de fois qu’il le voulait que l’insecte ne souffrait pas, qu’elle ne possédait pas de système nerveux pour ressentir la douleur, elle devinait l’ineptie de ces affirmations. Sans pouvoir se l’expliquer, elle savait à quel point la bête souffrait de ne plus pouvoir voler.

Pour la première fois, Lies découvrit que son père était aveugle. Elle ne tarda pas à découvrir l’ampleur de cette tare dans le genre humain.

Les petites grandirent, entrèrent à l’école l’une après l’autre. Autant Maaike se comportait comme une petite fille modèle, autant l’attitude de son aînée irritait ses instituteurs successifs : elle répondait, refusait de faire tel ou tel exercice, se plaignait de migraines à la moindre occasion. Parfois, elle refusait même de se nourrir, prise de nausées pour une raison incompréhensible. Après de nombreux examens, un médecin finit par diagnostiquer une forme d’hyperactivité, et lui prescrit les médicaments qui correspondaient à son problème. Elle protesta, affirmant qu’il ne se s’agissait pas de cela, qu’il fallait chercher ailleurs. Mais personne ne la crut. Excepté sa petite sœur.

Quand Lies parlait de ses étranges sentiments, Maaike écoutait avec fascination : elle disait que tous ces adultes ne voyaient rien, que pour eux une viande était une viande, pas un morceau d’animal – bien sûr, ils le savaient, mais ils ne visualisaient pas vraiment ce qu’avait vécu leur beefsteak. Sa malédiction, c’était de le sentir : chacune de ces cellules lui hurlaient leur existence d’antan. Les mots ne pouvaient exprimer ces sensations multiples, alors elle préférait les taire face à ces adultes à la fois sourds et aveugles.

Sa crainte la plus terrible était alors de devenir aussi imperméables qu’eux à la souffrance des autres.

Tant bien que mal, Lies continuait à résister à ce monde qui ne la comprenait guère, répétant les âneries qu’elle entendait pour qu’on cesse de l’interroger. Régulièrement, elle prenait un jeu de carte et le rabattait avec rage, sans ordre précis. Cela l’aidait à se concentrer, prétendait-elle, à ne plus entendre ce trop-plein d’informations qui l’empêchait de réfléchir. Même ses médicaments contre l’hyperactivité n’agissaient plus, et l’enfant agissait de plus en plus violemment.

Après le quatrième renvoi de leur fille aînée, les Wouters, dépassés, finirent par déscolariser Lies. Yolanda Wouters prit même un congé sans solde pour pouvoir surveiller cette enfant imprévisible. Durant tout ce temps, Maaike grimpa les échelons scolaires. Jusqu’à l’année fatidique où celle-ci trouva sa grande sœur plongée fiévreusement dans son syllabus de biologie.

« C’est là-dedans, murmurait-elle, haletante. C’est là-dedans.
– Qu’y a-t-il là-dedans ? questionna l’autre, perplexe.
– Ma différence. Elle est réticente, comme les yeux bleus. »

Interloquée, la jeune fille dévisagea cette sœur que tous disaient folle, avant de lui prendre délicatement des mains l’ouvrage, ouvert sur la page récapitulative des lois génétiques de Mendel. Comment avait-elle compris un tel concept, elle qui avait depuis longtemps abandonné les études ? Elle ne se l’expliqua pas, mais en tout cas cette théorie lui parlait : elle mettait des mots sur ses intuitions les plus intimes.

« Papa porte marque une différence, expliqua-t-elle, Maman porte la même, et toi aussi, mais elle est réticente.
– Tu veux dire récessive ?
– Réticente, continua-t-elle prenant entre ses mains le visage de sa sœur. Elle est réticente, parce qu’elle est seule. Mais j’ai les deux pièces du puzzle – c’est ça ma différence. »

Quand Maaike réalisa soudain la portée de cette découverte, elle resta interdite, observant à la dérobée cette fille si différente.

« Alors, ce serait une maladie orpheline ?
– Non, pas maladie. C’est vous qui êtes malades ; malades dominants en carence. Moi, j’ai juste retrouvé pureté des premiers double-réticents qui voient. »

Un sourire s’épanouit un certain temps sur son visage, avant de sombrer à nouveau dans la grimace d’une effroyable migraine. Maaike, pour sa part, ne savait que penser de ce bref instant de lucidité apparente, qui tourna si vite au délire. Elle garda le silence, ne sachant que faire d’autre.

Le drame se produisit quelques jours plus tard : Lies s’en prit violemment à sa mère, sans raison apparente. Une fourchette enfoncée dans l’épaule, la pauvre femme partit aux urgences dans les minutes qui suivit. L’enfant, elle, du attendre des mois de jugement avant de connaître sa destination : un institut psychiatrique. En juin de cette même année, Maaike rata ses examens et redoubla sa quatrième, mais nul ne lui reprocha en pareilles circonstances.

Chaque semaine, elle rendait une visite à sa sœur aînée, abrutie de médicaments dans sa camisole chimique. Cependant, jamais une seule drogue, aussi puissante soit-elle, n’avait empêché les moments d’extralucidité de Lies Wouters :

« Je dois aller là-bas », murmura-t-elle un jour, glissant de sa manche une brochure.

Celle-ci vantait les mérités d’un établissement scolaire en internat, dans un autre pays. La jeune fille fronça les sourcils, avant de demander :

« Où tu as trouvé ça ?
– Je dois aller là-bas, répéta-t-elle inlassablement, lui lançant un regard suppliant. C’est pas pour moi, ici.
– Ils ne te laisseront pas aller, tu le sais ! Tu es trop instable, cela te mettrait en danger et les autres avec.
– Je dois aller là-bas. S’ils veulent pas, vas-y à ma place, et dis-leur d’aller me chercher. Je dois aller là-bas. Si je reste ici, je meurs. »

Le ton ne laissait aucune équivoque, pas plus que la pression de ses yeux bleus : Lies n’exagérait aucunement en parlant ainsi. Bouleversée, Maaike replongea son regard dans le prospectus.

Après un certain nombre de discussions, la jeune fille finit par convaincre ses parents qu’une année en internat lui ferait le plus grand bien, après ce qu’elle avait vécu, sans oublier que cela ne pourrait que l’aider à mieux connaître le français. C’est ainsi que la jeune Wouters quitta son Limbourg natal pour se plonger dans l’étrange établissement d’Embrume.

Présent : Étudiante en Seconde, Maaike Wouters ne sait pas vraiment ce qui a poussé sa sœur à l’envoyer là-bas, ni quelles actions elle doit entreprendre exactement, mais elle se sent malgré tout investie d’une mission pour cette incomprise qu’on emprisonne comme une criminelle. Elle aime profondément Lies, et se refuse à croire que sa différence est une malédiction irrémédiable. Elle ne sait encore rien de la magie, ni de la véritable nature de cette différence.

Remarque : Lies Wouters présente un don somme toute assez courant chez les mages : mélange entre empathie et grand sens de l’intuition, ce sixième sens permet d’entrevoir parfois des réalités complexes à partir d’éléments fragmentaires. Les prédispositions de ce type, dites « passives », passent cependant le plus souvent inaperçues à l’instant même où elles sont couplées avec d’autres capacités plus offensives. Quelques rares cas de figures, à l’image de la sœur de Maaike, font pourtant exception : ceux-ci ne possèdent que ce don, qui peut dès lors prendre des proportions insoupçonnées. Un entraînement adéquat, bien connu des Anciens, permettait néanmoins à ces enfants de filtrer drastiquement le flux d’informations qu’ils assimilaient, jusqu’à ce qu’ils en acquièrent une meilleure maîtrise. Utilisé avec intelligence, ce sixième sens peut devenir une arme redoutable… qui peut très vite se retourner contre le mage en personne, dans certains cas.

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